Ils en font tout un fromage
En Mongolie, le développement de produits fromagers locaux offre des moyens de subsistance durables aux bergers nomades, dans le respect de la faune et de la biodiversité.

Tsendsuren Byambaa est née en 1970 dans la province reculée de Khovd, en Mongolie.

Tsendsuren Byambaa présente fièrement son travail lors d'une formation au développement de l'artisanat en 2017. Photo : Fondation pour la conservation du léopard des neiges (SLCF) et Snow Leopard Trust (SLT)
Aujourd’hui mariée et mère de six enfants, elle est bergère depuis sa jeunesse.

Montagnes de l'Altaï, Mongolie occidentale. Photo : Bolatbek Gabiden, Unsplash.com
Comme de nombreux autres bergers nomades en Mongolie occidentale, ils déplacent leurs campements au gré des saisons.

Membres de la communauté pastorale. Photo : SLCF et SLT.
En hiver, ils peuplent les collines du mont Khairkhan, qui culmine à près de 3 100 m d'altitude.
Ces chaînes montagneuses glacées et hostiles sont pourtant un habitat de choix pour les léopards des neiges et leurs proies.

Les léopards des neiges, repérés ici par une caméra à distance, sont considérés comme des espèces vulnérables. Ils sont classés dans la liste rouge des espèces menacées de l'Union internationale pour la conservation de la nature. Photo : SLCF et SLT.

Tsendsuren Byambaa présente fièrement son travail lors d'une formation au développement de l'artisanat en 2017. Photo : Fondation pour la conservation du léopard des neiges (SLCF) et Snow Leopard Trust (SLT)
Tsendsuren Byambaa présente fièrement son travail lors d'une formation au développement de l'artisanat en 2017. Photo : Fondation pour la conservation du léopard des neiges (SLCF) et Snow Leopard Trust (SLT)

Montagnes de l'Altaï, Mongolie occidentale. Photo : Bolatbek Gabiden, Unsplash.com
Montagnes de l'Altaï, Mongolie occidentale. Photo : Bolatbek Gabiden, Unsplash.com

Membres de la communauté pastorale. Photo : SLCF et SLT.
Membres de la communauté pastorale. Photo : SLCF et SLT.

Les léopards des neiges, repérés ici par une caméra à distance, sont considérés comme des espèces vulnérables. Ils sont classés dans la liste rouge des espèces menacées de l'Union internationale pour la conservation de la nature. Photo : SLCF et SLT.
Les léopards des neiges, repérés ici par une caméra à distance, sont considérés comme des espèces vulnérables. Ils sont classés dans la liste rouge des espèces menacées de l'Union internationale pour la conservation de la nature. Photo : SLCF et SLT.


Léopard des neiges. Photo : Dave Sherrill, Unsplash.com
Léopard des neiges. Photo : Dave Sherrill, Unsplash.com
Vivre en harmonie
En 2009, Tsendsuren, poussée par le désir de vivre en harmonie avec la biodiversité unique de sa région, a décidé de participer au programme des « entreprises au léopard des neiges » (Snow Leopard Enterprises).
Cette initiative de conservation communautaire offre des opportunités de revenus aux bergers vivant sur les montagnes en compagnie des léopards des neiges.

Des membres de la communauté pastorale ont pris part à des formations spécialisées. Photo : SLCF et SLT.
En coordination avec le Snow Leopard Trust, Tsendsuren a d’abord été formée au traitement de la laine, puis à l'artisanat.
Aujourd'hui, en partenariat avec la Fondation pour la conservation des léopards des neiges, elle participe à une série de formations dans sa petite province et dans six autres communautés afin de créer une industrie locale de production de fromage.

Des membres de la communauté pastorale ont pris part à des formations spécialisées. Photo : SLCF et SLT.
Des membres de la communauté pastorale ont pris part à des formations spécialisées. Photo : SLCF et SLT.

Lever de soleil sur les yourtes, Mongolie occidentale. Photo : Vince Yhban, Unsplash.com
Lever de soleil sur les yourtes, Mongolie occidentale. Photo : Vince Yhban, Unsplash.com
Moyens de subsistance durables et conservation
La plupart des habitants de cette région vivent dans des communautés de subsistance semi-nomades qui dépendent de l'élevage.
L'écotourisme, qui favorise la préservation de la biodiversité locale, représente une part de plus en plus importante de leur économie.
Tourisme de montagne durable
Le tourisme de montagne durable peut contribuer à créer des moyens de subsistance supplémentaires et alternatifs et peut servir à promouvoir la réduction de la pauvreté, l'inclusion sociale, ainsi que la conservation des paysages et de la biodiversité.
C'est donc un moyen de préserver le patrimoine naturel, culturel et spirituel, de promouvoir l'artisanat et les produits locaux, ainsi que de célébrer de nombreuses pratiques traditionnelles telles que les festivités locales.
Le tourisme de montagne attire environ 15 à 20 % du tourisme mondial.

Un obstacle à surmonter
Lorsque la pandémie de Covid-19 a frappé, la perte considérable de touristes internationaux a mis l'industrie de l'écotourisme en Mongolie à l’arrêt.
En 2020, selon les chiffres officiels, environ 95 % des 88 700 employés de plus de 2 300 entreprises dans le secteur du tourisme en Mongolie ont subi la perte de leurs revenus.

Tsendsuren se tient au premier rang, en 2e position en partant de la droite, avec un enfant sur ses genoux, et avec les membres de sa communauté après la formation qu’elle a suivie en juillet 2021. Photo : SLCF et SLT
Le tourisme a été l’un des secteurs les plus touchés par la pandémie, ce qui a eu un impact d’autant plus important sur les économies, les moyens de subsistance, les services publics et les opportunités à travers le monde.
En montagne, les restrictions de la pandémie ont accentué encore plus les vulnérabilités des communautés.

Photo : Projet ENSURE en Mongolie
Tsendsuren a immédiatement ressenti les conséquences des pertes des revenus du tourisme.
Elle était également très consciente des menaces croissantes pesant sur la faune sauvage, comme le braconnage, le surpâturage et l'exploitation minière.

Tsendsuren se tient au premier rang, en 2e position en partant de la droite, avec un enfant sur ses genoux, et avec les membres de sa communauté après la formation qu’elle a suivie en juillet 2021. Photo : SLCF et SLT
Tsendsuren se tient au premier rang, en 2e position en partant de la droite, avec un enfant sur ses genoux, et avec les membres de sa communauté après la formation qu’elle a suivie en juillet 2021. Photo : SLCF et SLT

Photo : Projet ENSURE en Mongolie
Photo : Projet ENSURE en Mongolie

Subventions communautaires pour la résilience de la faune sauvage
En avril 2020, en hommage aux effets de la Covid-19 sur le monde, The Lion's Share et le Programme de petites subventions (SGP), un programme d'entreprise du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) mis en œuvre par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), ont lancé un appel à projets pour soutenir les communautés qui dépendent du tourisme fondé sur la faune sauvage.

Elephants Alive, en Afrique du Sud, est un autre bénéficiaire du programme des subventions Covid-19. Ladite subvention a été utilisée pour soutenir l'unité anti-braconnage entièrement féminine, appelée Black Mambas. Photo : Rivoni Mkansi, Elephants Alive x Black Mambas.
Les neuf organisations bénéficiaires des subventions de l'initiative « Réponse à la Covid-19 : La résilience des communautés de la faune sauvage » ont été sélectionnés parmi plus de 1 600 candidatures présentées par des organisations de 106 pays.
Ces projets visent à renforcer la résilience des communautés dans les zones riches en espèces sauvages et à soutenir la protection continue des espèces sauvages menacées dans leurs derniers refuges.

Photo de formation dans la province d'Uvs, l'une des sept localités où la SLCF et le SLT soutiennent les efforts visant à établir une production locale de fromage. Photo : SLCF et SLT
La Fondation pour la conservation des léopards des neiges compte parmi les neuf – et Tsendsuren et sa communauté participent à ces efforts.

Elephants Alive, en Afrique du Sud, est un autre bénéficiaire du programme des subventions Covid-19. Ladite subvention a été utilisée pour soutenir l'unité anti-braconnage entièrement féminine, appelée Black Mambas. Photo : Rivoni Mkansi, Elephants Alive x Black Mambas.
Elephants Alive, en Afrique du Sud, est un autre bénéficiaire du programme des subventions Covid-19. Ladite subvention a été utilisée pour soutenir l'unité anti-braconnage entièrement féminine, appelée Black Mambas. Photo : Rivoni Mkansi, Elephants Alive x Black Mambas.

Photo de formation dans la province d'Uvs, l'une des sept localités où la SLCF et le SLT soutiennent les efforts visant à établir une production locale de fromage. Photo : SLCF et SLT
Photo de formation dans la province d'Uvs, l'une des sept localités où la SLCF et le SLT soutiennent les efforts visant à établir une production locale de fromage. Photo : SLCF et SLT
Avant que la Covid-19 commence à hanter le monde, Tsendsuren, avait commencé le travail avec les membres de sa communauté. Elle a donc pu voir les gens changer d'attitude envers les léopards des neiges.

Léopard des neiges repéré par une caméra en Mongolie, 2019. Photo : SLCF et SLT
En 2018, des léopards des neiges ont fait perdre à sa communauté du bétail. Il a fallu éduquer et sensibiliser les bergers pour leur permettre de reconceptualiser leur relation avec la biodiversité :
« Les gens ont cessé d’abîmer la faune sauvage ».
La communauté se fait appeler Ahuuna. Elle représente un modèle pour les bergers du pays qui s'organisent pour assurer la conservation des léopards des neiges.

Léopard des neiges repéré par une caméra en Mongolie, 2019. Photo : SLCF et SLT
Léopard des neiges repéré par une caméra en Mongolie, 2019. Photo : SLCF et SLT
Le fromage est une solution
En sa qualité de cheffe communautaire, Tsendsuren est à l’affût de toute occasion de s'engager dans le développement et le maintien de moyens de subsistance. En 2017, sa communauté a inauguré un projet de tourisme animalier, mais en raison de la Covid-19, ces activités ont été suspendues. En attendant, la production et la commercialisation de fromages sont une solution pour générer des revenus fiables, diminuer le braconnage dans l'habitat du léopard des neiges en Mongolie et atténuer les conflits entre les humains et la faune sauvage.
Avec une tradition de plus de 3 000 ans dans la production de fromages, Tsendsuren et ses compagnons de troupeau produisent des produits laitiers qu'ils vendent sur les marchés locaux. Elle apporte actuellement un revenu supplémentaire à son troupeau d’environ 150 dollars par an grâce à cette production. Les autres membres de la communauté, soit 13 ménages, gagnent près de 1 150 dollars supplémentaires.
La subvention de The Lion's Share et du SGP couvre la formation à l'amélioration de l'emballage et de l'étiquetage, les stratégies de marketing, l'amélioration des installations de production et l'accélération de l'accès aux marchés agricoles locaux et régionaux pour leur fromage en grains séché unique en son genre.

Le congélateur acheté permet de stocker les matériaux. Photo : SLCF et SLT
En juillet 2021, 78 femmes avaient été formées à la production de fromage.

Membres de la communauté lors de la formation à la fabrication de fromage.
Chacune des sept communautés participantes a désormais une capacité de production communale minimale de 100 kg de fromage sec en grains fabriqué à la ferme et de 100 kg de beurre clarifié (ghee). Tous les produits générés sont commercialisés localement.

Des études suggèrent que le fromage et d'autres produits laitiers ont été commencé à être produits dans le nord de la Mongolie il y a au moins 3 300 ans.
Le projet a financé la création et la production d'étiquettes et d'emballages (10 200 emballages et étiquettes au cours du premier cycle du projet), et ceux-ci sont expédiés aux communautés participantes pour les aider dans la commercialisation et la distribution.

L'aaruul ou fromage en grains mongol est l'un des principaux aliments des peuples nomades de Mongolie. L'aaruul est fabriqué à partir de lait caillé bouilli dans du lait frais, puis coupé en tranches et séché. Il a un goût unique et très fort. L'aaruul de Mongolie occidentale est mou et huileux en raison de l'utilisation de lait non pasteurisé.
Au total, les communautés participantes protègent 119 487 hectares du territoire du léopard des neiges grâce à leurs activités de subsistance.

Le congélateur acheté permet de stocker les matériaux. Photo : SLCF et SLT
Le congélateur acheté permet de stocker les matériaux. Photo : SLCF et SLT

Membres de la communauté lors de la formation à la fabrication de fromage.
Membres de la communauté lors de la formation à la fabrication de fromage.

Des études suggèrent que le fromage et d'autres produits laitiers ont été commencé à être produits dans le nord de la Mongolie il y a au moins 3 300 ans.
Des études suggèrent que le fromage et d'autres produits laitiers ont été commencé à être produits dans le nord de la Mongolie il y a au moins 3 300 ans.

L'aaruul ou fromage en grains mongol est l'un des principaux aliments des peuples nomades de Mongolie. L'aaruul est fabriqué à partir de lait caillé bouilli dans du lait frais, puis coupé en tranches et séché. Il a un goût unique et très fort. L'aaruul de Mongolie occidentale est mou et huileux en raison de l'utilisation de lait non pasteurisé.
L'aaruul ou fromage en grains mongol est l'un des principaux aliments des peuples nomades de Mongolie. L'aaruul est fabriqué à partir de lait caillé bouilli dans du lait frais, puis coupé en tranches et séché. Il a un goût unique et très fort. L'aaruul de Mongolie occidentale est mou et huileux en raison de l'utilisation de lait non pasteurisé.

Favoriser l'action
Présentée par Sir David Attenborough en 2018, The Lion's Share est une solution innovante pour lever des fonds essentiels pour la faune et les communautés en première ligne de la conservation.

Vingt pour cent de toutes les publicités que nous voyons mettent en scène des animaux et pourtant un million d'espèces sont menacées d'extinction, dont beaucoup en moins de quelques décennies.
The Lion's Share se sert du marketing pour offrir aux entreprises la possibilité de soutenir la conservation de la biodiversité mondiale, créant ainsi une nouvelle source de financement pour la nature.

Lionceaux, parc national de Ruaha, Tanzanie. Photo : Grégoire Dubois
Par le biais du PNUD, en collaboration avec l'équipe du SGP du FEM, des subventions comme celle-ci en Mongolie servent d'exemple de l'action de terrain rendue possible.


Lionceaux, parc national de Ruaha, Tanzanie. Photo : Grégoire Dubois
Lionceaux, parc national de Ruaha, Tanzanie. Photo : Grégoire Dubois
Action locale = impact mondial
En tant que programme du FEM, le SGP est mis en œuvre par le PNUD depuis 1992. Il apporte un soutien financier et technique aux initiatives de la société civile et des communautés qui s'attaquent aux problèmes environnementaux mondiaux tout en améliorant les moyens de subsistance locaux.
Depuis 2003, le SGP a soutenu 453 projets en Mongolie dans les domaines de la biodiversité, de la dégradation des sols, du changement climatique, des produits chimiques et des déchets, ainsi que des eaux internationales.
Pour plus d’informations, consulter la page du SGP en Mongolie et le site Web mondial du SGP (en anglais).

Histoire : Bayarjargal Agvaansteren (directeur exécutif, SLCF), Ganbaatar Bandi, Andrea Egan, Ana Paula Canestrelli, avec la contribution et le soutien de l'équipe de The Lion's Share.
Organisation visuelle : Andrea Egan
Photos : © Avec l'aimable autorisation de la Fondation pour la conservation du léopard des neiges (SLCF) et du Snow Leopard Trust (SLT), et d'autres individus tel qu’indiqué.
Photo d'en-tête : Produit laitier mongol Aaruul ou Gurt, fabriqué à partir de lait aigre égoutté, séchant au soleil. Photo : iStock.com/naumoid
Lieu : Mongolie